La découverte d'une crypte ossuaire en 1926 et les investigations de 1959
Une crypte-ossuaire fut mise au jour au Nord de l’ancien transept en 1926. D’après Anne Audier, il existait à Sainte-Gemme une tradition orale, selon laquelle il y aurait autrefois eu une église souterraine. Or, le fossoyeur, en creusant des tombes dans l’ancien cimetière, pensa avoir rencontré les restes de murs de ce sanctuaire. Des travaux permirent alors de découvrir une crypte à la voûte effondrée. Sur le sol, on trouve des vestiges de sculptures et des bases de colonnes que l’on suppose avoir été recueillis après le saccage de l’église par les protestants. Ni le maire ni le curé ne sont intéressés par ces vestiges qui sont remis à la personne commanditaire des travaux. Celle-ci a eu pour héritier son cousin, André Baudrit, professeur d’histoire au lycée de Royan, dont les enfants se partageront les découvertes.
La crypte, laissée sans entretien, ne tarde pas à se remplir de broussailles. En 1948, en voulant utiliser le terrain de l’ancien cimetière pour faire un terrain de sport, on détruisit de vieilles tombes, la partie supérieure des petites fenêtres romanes et quelques éléments des murs latéraux furent abattus. Cette perte est aujourd'hui regrettable[1] ».
En février 1959, le garde-champêtre du village creuse à la pioche le comblement de l’enfeu de la galerie Nord du cloître. Il détruisit les dalles de pierre qui couvraient un sarcophage contenant des ossements humains, une petite clé et une assiette à glaçure verte[2]. Lors des fouilles de 2003, des munitions américaines datant de la Seconde Guerre mondiale furent découvertes dans l’enfeu exploré en 1956 !
Les campagnes de fouilles de sauvetage et les restaurations
Les premières fouilles de sauvetage eurent lieu en 1982. Les membres de la Société d’Archéologie et d’Histoire du Gua fouillent la partie Est de la prieurale et les vestiges situés à l’Est des bâtiments claustraux. Deux autres campagnes suivirent. Au cours de celles-ci on mit au jour des structures souterraines, indéterminées ; on repèra les fondations de l’abside de l'un des chœurs romans et le transept de l’église ; on dégagea la salle capitulaire située à l’Est du cloître.
Le mur occidental du transept ainsi que celui de la façade de la salle capitulaire furent restaurés en 1988. En 1999-2000 l’avant-nef retrouva sa configuration initiale. Malheureusement la pose du nouveau dallage en pierre de taille n’a pas été précédée de fouilles archéologiques qui auraient pu permettre de mieux comprendre les fonctions de cette structure d’accueil, très rare en Saintonge.
Durant le printemps 2003, des fouilles archéologiques, missionnées par la DRAC, sont entreprises par Philippe Duprat et la Société de Géographie de Rochefort[3]. L’intervention permit le dégagement de la façade du chapitre et l’exploration attentive de plusieurs niveaux pré-casadéens sous le cloître et la salle capitulaire. Certains sont en relation avec les observations de 1982-1984. On a pu distinguer trois strates successives du haut Moyen Âge (sans datation précise, compte tenu des faibles surfaces sondées) : un habitat suivi d’un abandon et d’un cimetière – vraisemblablement associé à une église primitive (peut-être entrevue en 1984). Le site n’est donc pas vierge avant l’arrivée des moines de La Chaise-Dieu, et une fouille d’ensemble permettrait d’en savoir plus, car on ne peut exclure la présence de vestiges gallo-romains.
Après les fouilles de 2003, l’état inquiétant du mur Sud du cloître (des infiltrations d’eau étaient causées par le remblai moderne et par une descente pluviale) nous a déterminé à ouvrir une tranchée parallèle au mur Sud. Des restes d’architecture sont apparus : des bases et des fûts de colonne qui supportaient les voûtes des galeries, des portions de la banquette qui ceinturait le cloître, les anciennes circulations et portes donnant vers le réfectoire des moines et les restes d’un escalier en colimaçon datant du XVe siècle.
Les parties dégagées furent alors consolidées par rejointoiement et cristallisation des blocages avec mortier composé de lchaux aérienne et de sable du pays.
En février 2006, avant l’aménagement de la place de l’église, des sondages archéologiques sont entrepris : leurs résultats et l’étude du cadastre de 1830 nous portent à penser que l’enclos monastique s’étendait vers les terrains situés au Sud-Ouest des bâtiments claustraux.
[1] Baudrit A., Sainte-Gemme, histoire locale, église, prieuré, Saint-Ouen-en-Brie, 1996 (réédition d’Histoire de Sainte-Gemme, Charente-Inférieure, 1931, augmentée d’une étude historique et architecturale par J. Duguet et A. Audier).
[2] Cette intervention est mentionnée par un article paru dans Sud-Ouest du 6 février 1959.
[3] Duprat Ph., Sainte-Gemme (Charente-Maritime). Le prieuré. Diagnostic archéologique, Poitiers, 2003, dactyl. et « Fouilles archéologiques au prieuré de Sainte-Gemme en 2003 » in Roccafortis n° 34, septembre 2004.